Qu’est-ce que le toucher ?
Le toucher nous permet de prendre contact avec notre environnement. Le bout des doigts, la plante des pieds et les lèvres sont les organes les plus sensibles mais c’est l’ensemble du corps qui peut ressentir le toucher.
Les sensations de contact et de pression arrivent par la peau qui est constituée de deux couches : l’épiderme qui est la couche superficielle de la peau et le derme qui est la partie plus profonde. Les récepteurs sont ainsi situés dans le derme et l’épiderme.
Le toucher peut également comprendre la proprioception qui permet d’avoir conscience de la position et des mouvements de chaque partie du corps et qui donne au système nerveux les informations nécessaires à l’ajustement des contractions musculaires pour les mouvements et le maintien des postures et de l’équilibre.
Il existe plusieurs systèmes de fibres somesthésiques périphériques permettant la transmission des informations sensorielles au système nerveux central. Ces fibres sont de type nerveux et ont chacune un rôle soit pour la proprioception, la mécanoception, la nociception ou bien encore pour la thermoception. Les extrémités de ces fibres se ramifient dans la peau et les muscles.
Les différentes classes de fibres somesthésiques
Les fibres somesthésiques ont été réparties dans différentes classes en fonction de leurs différences en matière de propriétés réactionnelles. La première différence entre celles-ci est le diamètre des axones. En fonction de leur diamètre ces fibres assurent différentes fonctions.
- Les fibres les plus grosses sont les fibres Ia, elles assurent l’innervation de récepteurs sensoriels des muscles.
- Les fibres Aβ sont des fibres de diamètre légèrement inférieur. Elles véhiculent les informations tactiles.
- Les fibres de plus faible diamètre, les fibres Aδ et C acheminent les informations thermiques et nociceptives.
La vitesse de conduction des potentiels d’action dépend du diamètre de l’axone, celui–ci aura une taille plus ou moins importante en fonction de son utilité.
Les fibres somesthésiques présentent également une différence concernant leur champ récepteur. Les tailles des champs récepteurs varient en fonction des ramifications dans la peau. En effet, un champ récepteur peu étendu est dû à de petites arborisations terminales. La densité des fibres qui innerve une certaine région du corps a également une influence sur le champ récepteur. Les champs récepteurs des zones du corps où la densité d’innervation est élevée sont moins étendus que ceux situés dans les zones du corps faiblement innervées.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Le plus petit écart nécessaire pour distinguer deux stimulations simultanées est appelé le seuil de discrimination. Celui-ci varie fortement en fonction des régions de la peau, par exemple il faudra 2 mm pour distinguer deux stimuli sur le bout des doigts contre 40 mm sur l’avant-bras.
Les fibres sensorielles se distinguent également par leur mode de fonctionnement et il est possible d’en distinguer deux types. Certains récepteurs émettent une décharge continue si le stimulus est durable, ces récepteurs sont appelés récepteurs à adaptation lente, alors que d’autres en présence d’un même type de stimulus déchargent rapidement au début puis deviennent silencieux, ceux-ci sont appelés récepteurs à adaptation rapide.
- Les récepteurs à adaptation lente, également appelés récepteurs toniques, sont utilisés pour la détection de la taille et de la forme qui sont des caractéristiques spatiales.
- Les récepteurs à adaptation rapide, aussi appelés récepteurs phasiques, sont utilisés pour transmettre des informations sur des changements de la stimulation en cours.
Enfin, les fibres sensorielles sont sensibles à un certain type de stimulus. Leur réponse dépend du type de récepteur encapsulé et des propriétés des différents canaux.
Les mécanorécepteurs tactiles

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Les mécanorécepteurs représentent la plus grande partie des récepteurs sensoriels du système somatique et sont sensibles à des stimuli mécaniques. Plusieurs types de mécanorécepteurs peuvent entrer en jeu dans l’identification grâce au toucher actif d’un objet. Cette capacité d’identification grâce à une simple manipulation est appelée stéréognosie.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Les caractéristiques et les informations sur les rôles des différents récepteurs pour la sensibilité somatiques ont été définies en étudiant chez l’Homme et chez des primates des réponses de fibres afférentes individuelles obtenues dans des conditions contrôlées.
Il existe quatre classes de fibres afférentes mécanoceptrices. Chacune possède un rôle différent dans les aspects du toucher dépendant des propriétés mécaniques de leurs récepteurs spécifiques. Ces récepteurs spécifiques sont les cellules de Merkel, les corpuscules de Meissner, les corpuscules de Pacini, les corpuscules de Ruffini et les bulbes de Krause. Ils peuvent être impliqués dans la détection de la forme, de la texture, du mouvement et du déplacement de la peau ou bien encore dans la détection d’une vibration. Les connaissances de ces mécanorécepteurs sont les plus développées pour ceux de la peau glabre de la main.

- Les cellules de Merkel sont des fibres à adaptation lente et sont les seules à innerver les récepteurs présents dans l’épiderme, en étant situées à l’extrémité des crêtes sudorales épidermiques. Elles sont en très grand nombre dans les doigts et la main avec une densité d’innervation pour la pulpe des doigts de 100/cm2. Ce sont des récepteurs impliqués dans la détection des déformations soutenues de la peau permettant la perception de la forme et de la texture. Elles sont particulièrement sensibles à des points, à des bords et à des courbes. Ces cellules nous permettent de détecter et de localiser avec une forte précision les contacts avec la peau. En effet, la surface de leur champ récepteur est de 9mm2 et leur acuité spatiale est de 0,5mm ce qui est la élevée de tous les mécanorécepteurs.

- Les corpuscules de Meissner sont des mécanorécepteurs à adaptation rapide localisés dans le derme au sommet des papilles dermiques qui sont imbriquées entre les crêtes dermiques. Tout comme les cellules de Merkel ils possèdent un champ récepteur étroit avec une surface innervée de 22mm2. Les fibres de ces corpuscules possèdent une densité encore plus élevée que celles des cellules de Merkel avec par exemple une densité d’innervation pour la pulpe des doigts de 150/cm2. Les fibres qui sont associées aux cellules de Meissner possèdent une sensibilité aux déformations de la peau plus de quatre fois supérieure à celle des complexes de Merkel. Ils sont particulièrement sensibles aux aspects dynamiques des stimuli cutanés donc à la détection du mouvement et plus précisément au déplacement de la peau. Cela permet ainsi le contrôle de la préhension si un glissement d’un objet sur la peau est détecté. Ces mécanorécepteurs sont de forme allongée, ils sont constitués d’une capsule conjonctive qui enveloppe plusieurs lamelles formées par des cellules de Schwann. Le centre de la capsule est constitué de 2 à 6 fibres afférentes qui se terminent sous forme de disques entre les lamelles des cellules de Schwann.

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- Les corpuscules de Pacini sont situés dans le derme et les tissus profonds. Ils sont innervés par des fibres à adaptation rapide. Ces fibres possèdent une grande sensibilité et peuvent détecter des mouvements de la peau inférieurs à 10nm pour les plus sensibles Les champs récepteurs de ces corpuscules sont de grande taille et possèdent des frontières difficiles à déterminer. Si l’on considère la main, le champ récepteur d’un de ces corpuscule peut être la surface d’un doigt entier voir de la main elle-même. Ils sont constitués d’une capsule de membranes disposées en couches concentriques autour de l’extrémité d’une fibre afférente unique. Cette capsule sert de filtre et ne laisse passer que les vibrations de haute fréquence, c’est-à-dire les vibrations entre 250 et 350 Hz, afin qu’elles activent la terminaison nerveuse. Ces mécanorécepteurs servent donc à la détection des vibrations transmises par des objets tenus en mains ou en contact avec la peau ce qui nous permet l’utilisation d’outils.

- Les corpuscules de Ruffini sont situés dans le derme mais également des les ligaments et les tendons. Ils sont innervés par des fibres à adaptation rapide. Ces corpuscules possèdent un champ récepteur étendu tout comme les corpuscules de Pacini. Ces mécanorécepteurs sont de forme allongée en fuseau et sont encapsulés. Ils sont généralement orientés parallèlement aux lignes d’étirement de la peau ce qui les rend sensible à l’étirement de celle-ci. Ils possèdent donc un rôle dans la proprioception.

- Les bulbes de Krause sont situés dans les contours des régions de peau sèche et des muqueuses comme par exemple autour des lèvres et des organes génitaux. Ils sont sous forme de terminaisons nerveuses qui ressemblent à des perles enfilées.
Les mécanorécepteurs proprioceptifs
Les mécanorécepteurs proprioceptifs sont appelés propriocepteurs et nous renseignent sur les forces mécaniques du corps et plus particulièrement du système musculo-squelettique. Ils nous permettent de connaître la position spatiale exacte de nos différentes parties du corps car ils sont capables de détecter des changements d’angle inférieurs à 0,2°. Les mouvements complexes nécessitent des informations provenant de mécanorécepteurs de bas seuil dont font partie les organes tendineux de Golgi, les fuseaux neuromusculaires et les récepteurs articulaires. Les propriocepteurs intégrés dans le système vestibulaire apportent des informations sur la position et les mouvements de la tête.

- Les faisceaux neuromusculaires sont les propriocepteurs dont les connaissances en la matière sont les plus développées. Ils sont présents dans quasiment tous les muscles striés. Leur densité dans les muscles varie, plus le muscle aura une importance dans la réalisation de tâches importantes et délicate plus leur densité sera élevée. Ils sont constitués de quatre à huit fibres musculaires spécialisées qui sont appelées les fibres intrafusales et qui sont entourées d’une capsule de tissu conjonctif. Elles sont disposées dans les muscles parallèlement aux fibres extrafusales qui sont responsables de la force déployée par les muscles. Les fibres sensorielles afférentes s’enroulent autour de la partie centrale du fuseau. Les potentiels d’action sont donc déclenchés suite à l’étirement de ces fibres intrafusales dont l’étirement active des canaux ioniques sensibles aux forces mécaniques. Deux types de fibres innervent les fuseaux neuromusculaires, elles se différencient soit par des terminaisons primaires soit par des Les terminaisons primaires, proviennent des fibres du groupe Ia. Elles sont capables de détecter les changements de longueur du muscle et donnent des réponses à adaptation rapide. Elles nous renseignent ainsi sur la dynamique des membres, c’est-à-dire sur la vitesse et la direction du mouvement.
- Les terminaisons secondaires, proviennent des fibres du groupe II et répondent par une émission continue à des longueurs constantes du muscle. Elles nous renseignent donc sur la position statique des membres.
Les fibres intrafusales sont également des fibres musculaires contractiles contrôlées par les motoneurones γ qui sont des neurones moteurs situés dans la corne ventrale de la moelle épinière. Les variations de leur tension modulent la sensibilité aux changements de longueur du muscle des afférences fusoriales. En fonction du niveau d’activité du système γ les circuits centraux sont en capacité de fournir une image exacte de la position et du mouvement des muscles.

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- Les informations concernant les changements de tension des muscles proviennent des mécanorécepteurs à bas seuil des tendons appelés organes tendineux de Golgi. Ils sont situés dans les tendons parmi les fibres de collagène et sont innervés par des rameaux de fibres afférentes du groupe Ib. Les organes tendineux de Golgi sont organisés en série avec 10 à 20 fibres musculaires extrafusales.
- Les récepteurs articulaires ne possèdent qu’un rôle mineur dans la proprioception des membres mais sont très importants pour juger de la position des doigts. Ils possèdent un rôle protecteur en nous renseignant sur les positions limites que peuvent prendre les doigts dans l’étendue normale de leurs mouvements.
Transduction
La transduction sensorielle est le processus par lequel le stimulus physique (pression ou tension) est converti en un signal électrique.
Les canaux ioniques sensibles aux étirements
Les mécanorécepteurs de la peau sont tous constitués d’un axone amyélinique dont la membrane possède des canaux ioniques mécanosensibles. Ces canaux convertissent les forces mécaniques en des changements de courants ioniques. La conductance de ces canaux est modifiée par les forces qui leur sont appliquées et peut augmenter ou diminuer.
Les forces appliquées peuvent être de différents types .Elles peuvent être appliquées sur le canal par :
- la membrane si elle est déformée ou étirée
- les interconnexions entre les canaux et des protéines extracellulaire
- les interconnexions entre les canaux et des éléments du cytosquelette comme par exemple l’actine ou des protéines des microtubules
Les canaux ioniques peuvent également être régulés secondairement par des messagers secondaires de type DAG ou IP3 déclenchés par des stimuli mécaniques.
POUR ALLER PLUS LOIN
Il existe différents types de canaux ioniques intervenant dans la mécanoception mais les connaissances actuelles en la matière restent limitées. Les cellules de Merkel possèdent des canaux ioniques mécanosensibles appelés Piezo2 qui s’ouvrent en cas de pression sur la peau. Ces canaux en s’ouvrant dépolarisent la cellule en laissant entrer des cations, ce qui entraine la sécrétion d’un neurotransmetteur qui dépolarise la terminaison nerveuse. La terminaison nerveuse est également mécanosensible car elle présente des canaux ioniques qui sont situés dans sa membrane. Il y a donc une coopération entre ces deux systèmes pour activer les axones associés aux disques de Merkel et déclencher un potentiel d’action.
Le courant dépolarisant crée un potentiel générateur dans les terminaisons du nerf afférent, si l’amplitude est suffisante pour atteindre le seuil de déclenchement des potentiels d’action sont générés. La fréquence d’émission de ces potentiels d’action dépend de l’amplitude de la dépolarisation.

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